Antonio MACHADO, retrato / portrait* |
Converso con el hombre que siempre va conmigo
-quien habla solo espera hablar a Dios un día-;
mi soliloquio es plática con ese buen amigo
que me enseñó el secreto de la filantropía
Y al cabo, nada os debo; debeisme cuanto he escrito.
A mi trabajo acudo, con mi dinero pago
el traje que me cubre y la mansión que habito,
el pan que me alimenta y el lecho en donde yago
Y cuando llegue el día del último vïaje,
y esté al partir la nave que nunca ha de tornar,
me encontraréis a bordo ligero de equipaje,
casi desnudo, como los hijos de la mar.
Je parle avec celui qui toujours m'accompagne
- qui parle seul espère un jour parler à Dieu -
mon soliloque rhétorique avec ce bon ami
qui m'enseigna le secrret de la philanthropie.
Enfin, je ne vous dois rien; vous me devez tout ce que j'ai écrit.
Je me rends à mon travail et je paie avec mon argent
le costume que je porte et la demeure que j'habite,
le pain qui me nourrit et le lit de mes repos.
Et quand viendra le jour de l'ultime voyage,
quand le navire, qui ne doit jamais revenir, sera sur le point de partir,
vous me trouverez à bord, léger de tout bagage,
presque nu, comme les fils de la mer.
*Traduction extrait: Alice Gascar
|